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Exposition : du 2 décembre dès 18h00 au 23 décembre 2005
(M. Décaillet, C. Demierre, C. Ramelli)
Performances sonores :
2 déc. 20h30 (R. Decelière, T. Simonot)
3 déc. 19h30 (N. Quintane) et 20h30 (J. Montessuis)
Visite guidée :
3 déc. 16h : présentation des installations et des revues tissu, madam, erratum par Vincent Barras
Horaire :
je-ve-sa de 14h à 18h ou sur rendez-vous
Soutiens:
Ville de Lausanne, Office Fédéral de la Culture, Collection Alfred Richterich, Fondation Nestlé pour l'art, Canton de Vaud, Sandoz Family Office, Pour-cent culturel Migros
Son-langage, croisement
Les artistes réunis sous le titre Son-langage, croisement à Circuit font montre, dans leurs différentes productions, d’un intérêt singulier pour deux sphères fondamentales, et particulières, de l’activité humaine : le son, le langage.
On sait combien le son, dans la mesure où il s’est affranchi des conventions sociales conventionnelles qui tendent à l’enfermer dans des genres musicaux pré-établis (« Je n’ai jamais écouté aucun son sans l’aimer, le seul problème avec les sons c’est la musique », disait J. cage), s’avère un médium d’une plasticité remarquable. Un tel affranchissement est historiquement l’œuvre d’un certain nombre d’artistes qui se sont délibérément placés au croisement des genres (provenant tant de la sphère musicale, littéraire, qu’artistique proprement dite). Il n’en va guère autrement, d’un certain point de vue, pour le langage : par delà ses utilités de soi-disant pure communication, pour peu qu’on y prête l’oreille (ou l’œil, ou tout autre sens), ce dernier finit par constituer lui aussi une sorte de carrière ouverte, indéfiniment disponible, où venir puiser un matériau à son tour indéfiniment manipulable, servant à toutes fins utiles.
Il en résulte aujourd’hui une multiplicité de productions déployant leurs effets sur le plan spatial autant que temporel, laissant l’auditeur-spectateur dans une indécision féconde. L’activité de Nathalie Quintane, écrivain, ne se limite pas à l’espace littéraire (dont, par ailleurs, l’existence même est remise en cause par l’emploi brutalisé du langage qu’elle y déploie), mais se sédimente dans la forme de la lecture-performance. De l’autre côté du miroir, Carla Demierre, artiste formée aux beaux-arts, transforme l’écriture, voire le support du livre comme objet, en matière d’installation et d’interrogation plastique. Derrière les installations de Catalina Ramelli travaillent les plans invisibles du langage, idées flottantes, sentiments au seuil de leur émergence verbale, de même que l’introspection – ou recherche sur le langage intérieur - des installations vidéo de Muriel Décaillet. Les performances électroniques-bruitistes de Joachim Montessuis s’adressent à une riche palette sensorielle et émotive, les sonorisations auxquelles se livrent Thierry Simonot et Rudy Decelière ne se conçoivent pas sans l’appropriation complète d’un espace transfiguré en structure sonore totale.
Le travail du croisement, on peut l’éprouver aussi dans la pratique sociale des artistes réunis à Circuit, en considérant l’habitude régulière des collaborations et échanges mutuels qu’ils déploient (et qui trouve dans la forme particulière de la revue - trois d’entre elles sont présentées à Circuit - un lieu privilégié, manifeste de ce désir d’échange) : les plasticien/ne/s présentent des formes visuelles-spatiales où pourtant la question du son et de la langue est pendante (manifestement ou sotto voce) ; les musicien/ne/s travaillent avec les principes éminemment plastiques de l’espace et du corps ; les auteur/e/s sont intimement concernés dans leur production langagière – écrite ou orale – par les dimensions de la parole et du temps.
C’est ainsi que Son-langage, croisement nous convie à opérer sur nos catégories perceptives une certaine indistinction, dont on fera l’expérience dans la substance même des œuvres - installations, vidéos, performances, lectures, diffusions sonores - présentées dans l’espace-temps des Urbaines à Circuit.
Vincent Barras