CIRCUIT
Centre d’art contemporain
9, av. de Montchoisi
(accès quai Jurigoz)
case postale 303
CH – 1001 Lausanne
Tel Fax +41 21 601 41 70
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“... avant il n’y avait rien, après on va pouvoir faire mieux.”*

carton d'invitation dessiné par :
Alan VEGA

* Henri Michaux en préambule à son film “Images du monde visionnaire”, 1964

Le dessin, dans toute sa complexité et sa diversité, existe peut-être et avant tout par son apparente économie. La simplicité possible d’une feuille et d’une technique, un moment pris, une surface remplie. Envisageant le motif et son dessein, l’exposition offre une ouverture nécessaire sur l’écriture et l’art imprimé au travers du dessin et de ces formes possibles de diffusion.

Cette exposition s’offre au regard d’une large sélection d’œuvres dessinées et imprimées d’Alan Vega (né en 1938 à Brooklyn), et accompagnant la sortie de l’ouvrage rétrospectif sur l’œuvre de cette figure mythique de la scène alternative artistique New Yorkaise et pionner du rock électronique minimal en tant que cofondateur avec Martin Rev du groupe culte Suicide. Sur plus de 40 ans de création et d’intensité, Alan Vega s’est affirmé comme l’un des artistes et musiciens les plus influents, faisant du Punk le manifeste d’une raison de vivre.

Cofondateur en 1969 de MUSEUM A Project of Living Artists à New York, un des premiers lieux alternatifs « artist-run spaces » new-yorkais et ouvert 24h/24, MUSEUM était dédié à toutes les formes d’art, aussi bien visuelles que musicales et cinématographiques, devenant rapidement un tremplin pour un grand nombre d’artistes et de musiciens. Vega écrit alors les « Requêtes du Front de Libération du MUSEUM », une série d’injonctions nécessaires et tellement actuelles incluant par exemple ce cri pour que « les systèmes d’exposition, y compris les sélections pour les expositions collectives, soient abolis. » ou encore donnant « le droit à n’importe quel artiste de retirer une œuvre, de modifier une œuvre, de détruire une œuvre de n’importe quel autre artiste présentant son travail dans l’espace » - un texte signé par un Artiste Américain Anonyme du 20e siècle- qui accueille aujourd’hui les visiteurs entrant à CIRCUIT.

À la fin des années 50, Alan Vega étudie notamment avec Ad Reinhardt et Kurt Seligmann au Brooklyn College, et se concentre dans un premier temps sur la peinture, puis le dessin. À la fin des années 60, son intérêt se porte sur la lumière : il crée ses premières « light sculptures », des sculptures lumineuses faites d’assemblage d’objets divers composées d’ampoules, de câbles, de télévisions et de néons de toutes formes et couleurs. Anti-esthétique, antiforme, le pendant d’un Arte Povera « Made in USA », son œuvre embrasse la réalité contemporaine dans laquelle il vit.

L’exposition se concentre principalement autour de son œuvre graphique. Vega insiste comment « pour (lui), le dessin a toujours été un devoir, (et) la peinture une douleur ». Dessinant quasi uniquement des visages, il déclare avoir toujours « aimé dessiner des personnes âgées. Elles ont l’image de la vie gravée sur leur visage ». Activité parallèle et nécessaire à son travail musical, Vega ne peut écrire sans dessiner : « Tout comme l’écriture, dessiner constitue une obsession quotidienne. Comme pour l’écriture, faire un dessin surgit subitement. Avec le dessin, il faut partir ailleurs, quelque part où je n’en ai rien à foutre. Je m’assois, l’esprit absent et en paix (…). C’est une manière de mettre à plat des idées ».

L’exposition se propose ainsi comme un écho suicidaire au désir d’une exposition qui n’est autre qu’un inventaire morcelé et subjectif.

Son agencement reflète le système d’écriture possible d’une exposition entendue comme le manifeste concrétisé d’une poésie qui se montre. Le chant de mille voix entamant un anthem ou le dessin est l’égale de sa reproduction. Envisageant l’ensemble des œuvres présentes ou suggérées comme un environnement sensible, toutes s’écrivent dans l’espace comme une partition à lire abstraitement.

Oscillation sensée de pièces ultra-figuratives qui (se) composent de nouvelles figures et identités poétiques, au contrepoids composé d’une large sélection d’œuvre abstraite, toutes s’offrent à être lues comme la « carte mentale d’une exposition ». Cette phrase devient à son tour le titre de l’ouvrage photocopié mis à disposition au public, un recueil ou se retrouve mis au même niveau toutes les œuvres constituant cette exposition.

Les rapports, cohésions ou rejections qui s’opèrent entre chacune des parties constituantes de se regroupement temporaire insistent sur la base qui les unies toutes - le dessin, et ses modes possibles de diffusion. D’un médium à l’autre s’affirme une équivalence sur la valeur nécessaire des œuvres présentées.

Hasard arrangé par la géométrie, hors d’une utopie moderne, cet agencement éphémère offre un va-et-vient d’objets référencés, et reproduits… Et si ce qui au départ s’offrait comme un vide premier laissant toutes formes de futures possible, permettons nous de conclure avec une autre phrase d’Henri Michaux, une phrase autant tiré de son magnifique ouvrage de 1948 ‘Meidosems’ qu’extraite – pour l’instant – de l’exposition :

« Ils ont abouti ici. Et il n’y a rien à ajouter ».



Mathieu Copeland et Philippe Decrauzat
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